L’ombre du vent de Carlos Ruiz Zafon

A l’ombre de Barcelone, le vent

Premier roman de Carlos Ruiz Zafon, présenter L’ombre du vent est devenu inutile. Sorti en 2004, le magnifique roman espagnol est devenu un best-seller, mais pas un mauvais best-seller. L’ombre du vent n’est pas juste agréable à lire. Derrière, il y a un monde fabuleux qui a été imaginé, une plume maîtrisée et une intrigue parfaitement menée.

Avec ce livre, nous sommes entraînés dans une histoire rocambolesque qui se passe dans la Barcelone des années 1940 : après avoir été choisi par un livre dans le cimetière des livres oubliés, le jeune Daniel est lancé dans une aventure à la recherche de l’auteur du livre en question, L’ombre du vent de Julian Carax. Cette quête est remplie de mystères et de dangers et laisse peu à peu place à la recherche de soi. Tout est centré sur ce livre qui semble influer sur la réalité de Daniel, dont la vie est de plus en plus proche que celle comptée dans L’ombre du vent : rencontre avec le diable, maison hantée et histoire de coeur… On a envie de lire ce livre fabuleux dont on nous parle si souvent avant de prendre conscience que nous sommes déjà dans un livre fabuleux, rempli de magie, de noirceur et d’aventures.

Les personnages que nous rencontrons sont tous intéressants : Daniel, jeune naïf au grand coeur et à la volonté farouche, son père, homme très calme et très attachant par son côté effacé, Fermin, l’incomparable compère de Daniel dans ses recherches, Nuria, qui nous confiera son témoignage avec beaucoup d’émotion, l’inspecteur Fumero, homme malsain entouré de mystères… Par contre, les femmes n’ont aucun rôle majeur dans le récit : elles sont le plus souvent des sources d’amour ou des témoins de l’histoire de Carax, rarement plus. Mais tous les personnages sont bien campés et si toutes leurs histoires ne sont pas données, la profondeur de chacun d’eux se devine.

Avec tout ce florilège de personnages, l’intrigue qui se met en place est des plus étranges. Sur fond de tragédie (le destin se mêle plus d’une fois de réunir nos personnages), elle varie entre réalisme et fantastique tout en se tournant facilement vers une histoire policière. On est transporté devant cette vaste investigation remplie d’évènements tous liés entre eux. Des parallélismes et des liens se mettent en place entre les différents personnages à travers les époques et les milieux.

Entre l’histoire de Carax et l’histoire de Daniel toutes deux liées à L’ombre du vent, c’est le destin qui semble au centre de tout. Le parallélisme entre les deux personnages et leur histoire, l’étrange attirance de l’un pour l’autre et vice-versa, l’influence de chacun sur la vie de l’autre : tout est affaire de destin et de destinée, le ressort romanesque par excellence. Carlos Ruiz Zafon joue avec nous pour avancer dans son histoire, nous faire croire des choses qui sont fausses et nous cacher les vraies, nous surprendre et nous émouvoir.

L’auteur est également capable de créer des ambiances particulières, souvent au bord de la réalité. La noirceur, l’étrangeté, l’attente, la peur sont ainsi à la limite du palpable grâce aux mots utilisés et au temps qui est prit pour s’y arrêter, les décrire. On a parfois l’impression que le temps s’arrête pour que nous saisissions toute l’importance de ce moment, et l’ambiance précise dans laquelle il se passe. Pour camper ces ambiances, Carlos Ruiz Zafon nous plonge dans un contexte trouble très bien choisi : Barcelone dans les années d’après guerre civile espagnole. On entend déjà dire que le roman meurt à cause des nouvelles technologies, comme quoi le discours n’évolue pas vraiment et peut-être ne devons nous pas nous inquiéter trop tôt.

Entre ses personnages attachants, sa plume douce et poétique, la noirceur ambiante, la double intrigue centrée sur la littérature, le contexte intéressant et le mystère qui entoure le récit, Carlos Ruiz Zafon signe un roman captivant parfait pour l’été et pour ceux qui ne l’auraient pas encore lu.

L’ombre du vent

de Carlos Ruiz Zafon

éditions Grasset

11 Avril 2004

A propos Constance

Enseignante, j'aime tout autant la littérature ado / jeune adulte que la littérature contemporaine et la bande-dessinée. J'ai souvent tendance à lire des textes écrits en français, mais je fais parfois des incursions vers de la littérature anglophone ou des traductions pour les autres langues.
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19 commentaires pour L’ombre du vent de Carlos Ruiz Zafon

  1. Yspaddaden dit :

    Oui, c’est un bon roman que j’ai lu l’été dernier avec plaisir. C’est juste un chouïa trop calibré, ou attendu, mais je chipote…

  2. Mathilde dit :

    Je n’ai lu que l’Empreinte de l’ange, que j’ai apprécié mais je ne pense pas lire celui-ci, on m’a trop dit qu’ils se ressemblaient…

  3. Anne Sophie dit :

    j’en ai lu tellement de bien qu’il est dans ma pal !

  4. Gwenaelle dit :

    Je l’ai lu il y a longtemps, l’ai apprécié mais me rends compte que je n’ai pas gardé beaucoup de souvenirs de l’histoire…

  5. restling dit :

    J’avais beaucoup aimé ce roman mais la suite m’a laissé un sentiment un peu plus mitigé…

  6. petitepom dit :

    j’aime beaucoup sa plume et ses histoires très originales

    • constance93 dit :

      c’est vrai que c’est sympa à lire 😉
      le seul reproche que je lui fait, c’est qu’il n’a fait que reprendre l’histoire de L’Ombre du Vent à une autre sauce pour Le Jeu de l’Ange 😛

  7. Grimmy dit :

    Même reproche : j’ai été un chouilla déçue pour ça aussi. Mais ça se lit très bien !

  8. Karine:) dit :

    Ca a été un coup de coeur, ce roman! Et lorsque je suis allée à Barcelone, je me suis amusée à imaginer tout ça dans le bouquin!!

    • constance93 dit :

      oui, j’imagine qu’une petite visite à Barcelone derrière ne peut que l’enrichir.
      j’ai passé un très bon roman de lecture mais le souvenir commence déjà à s’en estomper : dommage…

  9. Clémence dit :

    Quelle critique! Te destines-tu à être chroniqueuse?

    Sinon, je pense que tu sais déjà que j’ai adoré ce livre, que ça a été un vrai bonheur de le dévorer et que, contrairement à toi, certains personnages viennent encore me hanter! 🙂

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