Deux nouvelles très courtes, qui se lisent facilement et qui n’ont pas de lien entre elles.
La première, également la plus longue, Un rasta à Berlin, raconte l’histoire d’un écrivain membre des jurys cinématographiques de différents festivals parmi les plus célèbres. Là, il est à Berlin où il a décidé d’invité son plus jeune fils, Gonzalo Gabriel, qu’il surnomme « le néphélibate » par rapport à sa tendance à avoir toujours la tête dans les nuages.
Entre des séances harassantes de projections et de délibérations (à la différences de ces anciens postes de jurés : « à saint-sébastien, avec le jury, nous discutions surtout gastronomie (le Pays Basque a la cuisine la plus exquise d’Espagne) » et à Cannes, où « deux réunions nous suffirent, à nous [les] subordonnés, pour nous entendre, en une conversation amicale, sur la distribution des récompenses »), notre narrateur discute avec son fils, bien différent de ce qu’il attendait : le doux rêveur est en effet devenu un « rastaman » sûr de ses convictions. Et quelles convictions ! Ce que le narrateur appelle la « religion rastafari » est rempli de concepts obscurs et incompréhensibles à cet homme qui voit son fils s’affirmer dans une voie qu’il ne s’attendait pas à le voir prendre. Ce qu’il assimile tout d’abord à des prétentions écologiques, au regard du film Antarctique qu’il voit à l’occasion du festival, lui apparaît au fur et à mesure comme bien plus complexe.
Son étonnement et son incompréhension vont croître au fur et à mesure qu’un sourire va naître chez le lecteur face aux dialogues entre le père et le fils qui vont jusqu’à s’interroger sur la possibilité pour le riz, les cornichons et les petits pois d’avoir une âme.
La réaction du père, entre inquiétude et incompréhension, est intéressante : elle représente un choc générationnel mais aussi l’attitude d’un parent face aux changements d’un enfant. A l’inverse, Gonzalo Gabriel représente l’adolescent en devenir qui se cherche, croit se trouver en quelque chose avant de devenir autre.
La nouvelle se lit très vite. La langue est pure, drôle, travaillée et efficace. L’histoire, qui ne se passe que sur quelques jours, avance à une vitesse stable. De petits détails, comme le style vestimentaire, la doctrine « rasta » ou l’exaspération que produit la présidente du jury sur le narrateur, sont insérés. Ils offrent au récit plus de sens, un peu de profondeur. La nouvelle, qui se fait de fait plus longue (une cinquantaine de pages au final), oscille ainsi entre concision et développement, avec bien sûr une grande part offerte à la concision pour un résultat rempli de légèreté, tant dans l’intrigue que dans le style.
La deuxième nouvelle, Ma parente d’Arequipa, m’a moins convaincue. Très courte (sept pages), elle raconte l’histoire d’une parente éloignée du narrateur devenue religieuse dès son enfance. Bien évidemment, il n’y a que très peu de rebondissements, voir pas du tout, mais l’écriture est belle, notamment dans les dernières lignes.
Un rasta à Berlin, suivi de Ma Parente d’Arequipa
de Mario Vargas Llosa
ed de L’Herne
écrit en 1985
publié chez L’Herne en 2009
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opération Masse Critique n°10 de Babelio
c’est amusant de la littérature espagnole qui se passe à Berlin !
en effet 😉
J’adore l’écriture et le style de Mario Vargas Llosa.
Je n’ai pas lu ces nouvelles mais la plupart de ses romans. Quel plaisir de lecture !
Amitiés
je tenterai sûrement ses romans un jour ou l’autre…
Merci pour votre chronique… à bientôt !
merci à vous.
L’auteur a aussi attiré mon attention suite au prix Nobel, même si un de ses romans traînait chez moi depuis longtemps. Je finirai par le lire 🙂
oui, un jour (je me dis souvent ça ^^)