L’homme qui n’y croyait pas de Michel Manière

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Etalage d’écrivain

L’homme qui n’y croyait pas, dernier roman de Michel Manière, se propose de plonger son lecteur dans l’aventure de l’écriture en suivant le personnage écrivain qui se fait alors écho de l’auteur, si ce n’est l’auteur lui-même. Celui-ci est en effet au début de l’écriture de son prochain récit, fortement autobiographique.

Deux récits s’emmêlent ainsi au sein de L’homme qui n’y croyait pas. Le titre, par exemple, convient au deux. Plus souvent on hésite à savoir ce qu’est la véritable substance de ce récit : la vie et l’aventure de l’écriture que vit un écrivain ou le récit que l’écrivain constitue sous nos yeux, très proche de ce que vit le narrateur du premier ?  Nous sommes perdus, d’autant plus que la distinction, signalée par une police en italiques pour le récit en court d’écriture, se double d’un usage intempestif de l’italique. La lecture s’en fait usante, en plus de ne pas être passionnante.

On a en effet l’impression de ne pas sortir de la vie de notre personnage et de celle de son meilleur ami, fortement lié à elle. C’est au portrait de deux hommes vieillissants ensemble, l’un au côté de l’autre malgré la distance, auquel nous avons affaire. Ces personnages touchés par la vie sont touchants aux yeux du lecteur. On apprend peu à peu les évènements marquants de la vie du narrateur, et on suit ceux qui touchent présentement son meilleur ami, Louis.

Le reproche que je ferai à ce livre, par ailleurs très sensible, est qu’il est trop centré sur ces personnages. Il nous raconte une histoire que les personnages vivent et le récit se focalise là-dessus. Ce récit nous amène bien sûr sur des sujets très forts comme l’homosexualité, le deuil d’un proche à la mort d’un enfant, mais j’ai trouvé l’auteur refermé sur lui-même, son travail d’écrivain et la vie qu’il invente à son personnage, si ce n’est pas sa vie réelle.

L’écriture, quant à elle, m’a paru hélas assez insipide, rempli de tournures et de figures de style pesantes. Le narrateur fait dès le début des références à Proust (notamment) qui ne m’ont pas interpellé, et qui ne m’ont en aucun cas donné l’idée de comparer ce livre à un de ceux de Proust. Mais Michel Manière lui-même décrit mieux que moi ce qu’est son écriture à travers son narrateur se penchant sur ses écrits de la veille : « sur des pages et des pages, une tentative d’analyse que de ronflantes métaphores louchant vers Proust ne parvenaient pas à faire passer pour de l’écriture ». Des exemples pour illustrer ?

« il me fallait y aller, prendre mon élan, foncer, crever ce masque avec mon corps comme le lion crève l’écran que le dompteur tend devant lui, sauter dans le vide… »

« Perdu j’étais. Et perdu quand donc l’avais-je été plus qu’aujourd’hui, sinon enfant ?

Enfant j’étais. »

Alors sans doute suis-je passer à côté de la visée de ce récit, et peut-être d’autres lecteurs trouveront-ils ce texte vibrant d’émotion, portant un véritable regard sur la société et le travail d’écrivain ou que sais-je encore. Il reste que ce livre est une déception pour moi. Je regrette une ouverture vers un monde plus réel que celui de notre narrateur, et une écriture plus fluide et efficace. Dommage…

L’homme qui n’y croyait pas

de Michel Manière

ed du Seuil

à paraître – 31 Août 2011

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Merci tout de même à Libfly et Furet du Nord pour ce livre reçu dans le cadre de l’opération

A propos Constance

Enseignante, j'aime tout autant la littérature ado / jeune adulte que la littérature contemporaine et la bande-dessinée. J'ai souvent tendance à lire des textes écrits en français, mais je fais parfois des incursions vers de la littérature anglophone ou des traductions pour les autres langues.
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9 commentaires pour L’homme qui n’y croyait pas de Michel Manière

  1. gambadou dit :

    Tellement de livres lors de la rentrée, un de moins à noter !

  2. Gwenaëlle dit :

    Un style ampoulé me fait fuir aussitôt!

    • constance93 dit :

      va donc voir ailleurs dans ce cas là ! 😉
      j’ai plein de choses biens à te conseiller. si tu veux une liste plutôt que de feuilleter mon blog, tu n’as qu’à demander 😉

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  4. Sébastien dit :

    Ah, au début de ta critique, je me suis dit « tiens ! je ne connaissais pas, mais ça a l’air pas mal ! » mais, au fur et à mesure, j’avais de moins en moins envie. Un de moins, comme l’a dit Gambadou ! ^^

    • constance93 dit :

      c’est peut-être méchant, mais le but de ma chronique est de ne pas donner envie de lire ce livre. prendre un ton neutre au début a un bon effet je trouve : on est intéressé par ce que je dis, et paf, je balance mes critiques qui sont bien reçues 😉
      mais non, autrement, ce livre ne m’a absolument pas convaincu. c’est un bouquin ego-centrique commeil y en a tant, et si certains y trouvent leur compte là-dedans et y voient une démarche originale et novatrice, et bien moi non, tout simplement.

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