Ce qu’il advint du sauvage blanc, de François Garde

Une robinsonnade à la française

C’est l’histoire d’un homme abandonné sur une île déserte. Pour autant, ce premier roman de François Garde n’a rien en commun avec Robinson Crusoé. Les descriptions y sont précises, mais l’exotisme quasi absent, de même que l’aventure. C’est une histoire d’adaptation à une culture et de réadaptation à une autre.  Si on s’y laissait prendre, on pourrait penser que l’imaginaire n’a pas sa place dans ce récit à l’analyse scientifique (sociologie, anthropologie…) et inspiré d’une histoire vraie. Son auteur a pourtant une très grande imagination pour reconstruire cette histoire, doublée d’une maîtrise parfaite de la langue et d’un réel souci d’authenticité.

Narcisse Pelletier a dix-huit ans quand il arrive sur la côte nord-est de l’Australie, abandonné par son navire. Il en a trente-six quand il y est retrouvé. Il a passé la première moitié de sa vie dans un petit village de Vendée, la seconde parmi un peuple aborigène qui l’a recueilli. Il s’appelle maintenant Amglo. Il est devenu un sauvage blanc, ne parle plus la langue française et ignore tous les codes de la société occidentale. Nous suivons ce premier passage forcé d’une culture à une autre à travers un récit très bien mené, dans lequel la solitude et l’incompréhension se ressentent à leur paroxysme.

Lorsque l’explorateur et scientifique Octave de Vallombrun entend parler de cet homme, il cherche à comprendre ce que celui-ci a vécu et à accompagner  son retour à la civilisation. Il raconte au président de la société de géographie à travers quatorze lettres ses découvertes et les progrès de son protégé. Il s’interroge surtout sur les deux cultures, sur leurs différences et sur leur validité à toutes les deux. Les préjugés d’un européen se retrouvent confrontés à une autre culture.

L’ensemble est passionnant. La réflexion sur les science humaines et sur notre rapport à l’autre et sur l’existence elle-même s’allie à une véritable histoire, une sorte de roman d’apprentissage à une autre culture, une autre manière de penser, un autre mode de vie. Un premier roman impressionnant.

Ce qu’il advint du sauvage blanc

de François Garde

ed Gallimard

12 janvier 2012

A propos Constance

Enseignante, j'aime tout autant la littérature ado / jeune adulte que la littérature contemporaine et la bande-dessinée. J'ai souvent tendance à lire des textes écrits en français, mais je fais parfois des incursions vers de la littérature anglophone ou des traductions pour les autres langues.
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20 commentaires pour Ce qu’il advint du sauvage blanc, de François Garde

  1. Ce livre me tente beaucoup. Et j’ai vu qu’il a obtenu le Goncourt du premier roman :).

  2. Richard dit :

    Un livre et une critique qui ont éveillé ma curiosité ! J’aime ce genre de livre qui fait appel à notre intelligence. Et quel courage de l,auteur de re-visiter cette thématique souvent exploitée.
    Merci mon amie
    À très bientôt

  3. blogclara dit :

    Un premier roman en plus et une histoire qui a tout pour me plaire !

  4. gambadou dit :

    et encore un livre noté ! Etonnante cette histoire. Je n’avais pas suivi ce prix du premier roman

  5. Violette dit :

    j’aime beaucoup les robinsonnades, je note!

  6. Leiloona dit :

    Je l’ai lu, mon billet sera bientôt écrit … Quand j’aurai plus de temps. Un premier roman vraiment étonnant, oui, très loin des productions presque autobiographiques de certains.

    • constance93 dit :

      j’ai hâte de lire ton billet. le temps nous manque toujours pour parler des livres que nous avons aimé, c’est dommage 😦
      mais c’est vrai qu’un premier roman aux antipodes du nombrilisme à la française, ça fait du bien ! 🙂

  7. J’avais aussi beaucoup aimé et j’espère qu’il sortira vite en poche pour pouvoir le proposer à mes élèves! 😉

  8. lorenztradfin dit :

    ….je pense que ce livre est un sérieux candidat pour le Livre Inter. Je souscris entièrement à ce que tu dis. Et au vu des réactions de mes co-lecteurs dans notre groupe de lecture, le « Shadow-Cabinet » je ne suis pas le seul à le penser.

  9. Ping : “Ce qu’il advint du sauvage blanc”, de François GARDE (OUI… mais !) | Sur mes brizées

  10. Le Koala Lit dit :

    Je suis en pleins dans le roman, et je suis heureuse d’etre tombée dessus… casi par hasard. Je tiens un blog sur la littérature australienne, ce livre est donc une petite entorse a mes lectures habituelles… Mais je ne regrette pas, c’est comme tu le dis PASSIONNANT !! Je suis absoluement conquise par l’histoire et par le style de l’auteur. Un délice qui semble avoir un succes unanime sur les blog et dans la presse. Je me suis renseignée, et le livre n’a pas ete achete par des editeurs anglophones, et notamment australien… c’est bien dommage !

    • constance dit :

      ça parle un peu d’Australie, alors ce n’est pas totalement hors sujet 😉
      j’ai rencontré deux ou trois billets négatifs, mais on ne peut pas non plus faire l’unanimité !
      le livre est paru récemment, laisse-lui le temps de faire son bout de chemin, peut-être finira-t-il dans des librairies australiennes un de ces jours 🙂

  11. BMR dit :

    Tout le propos de François Garde semble tourner autour de l’incompréhension totale, mutuelle et réciproque.
    Incompréhension de Narcisse qui débarque chez les sauvages qu’il trouve laids et bestiaux.
    Incompréhension des aborigènes qui traitent le naufragé comme leurs propres enfants, encore ignorants des coutumes ancestrales comme des simples règles de survie dans le bush.
    Incompréhension du rescapé Narcisse qui ne voit pas pourquoi on l’a arraché à la vie qu’il s’était reconstruite patiemment et durement après quinze longues années de renoncements. Il se réfugie dans un mutisme complet, refuse de ré-apprendre le français et veille à ne donner aucun indice sur ce qu’il a vécu.
    Incompréhension de Vallombrun qui est fasciné par le fait que l’homme blanc supérieur a ‘régressé’ et tout oublié de sa civilisation, coutumes, pudeur, langage, …Tout cela est bien sûr fictif.
    Ces abimes d’incommunicabilité réciproques et l’alternance des chapitres et des points de vue, finissent par dégager un étrange sentiment de malaise et de frustration.

    • constance dit :

      oui, c’est vrai qu’il y a beaucoup d’incompréhension de part et d’autre, mais aussi de la fascination et de l’adaptation, même si celle-ci est difficile.
      si j’ai moi aussi ressenti un malaise, je ne me rappelle avoir eut de la frustration… question de lecteurs j’imagine ^^

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