La Vérité sur Marie de JP Toussaint

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ENTRE BEAUTÉ ET VULGARITÉ

La Vérité sur Marie n’est pas à proprement parler une histoire de réalité, comme le suggère son titre. Un titre, dans un roman, c’est presque ce qu’il y a de plus important : La Vérité sur Marie, par exemple, me murmurait « réalité », « femme » et « amour ». Belle déception ! Je suis arrivée à la fin du roman et je ne sais toujours pas qui est Marie et je connais encore moins sa façon d’aimer et d’être aimé. Et je n’ai jamais vu de roman soi-disant « réaliste » aussi fantasque : j’ai rencontré un cheval qui vomi et s’échappe en plein aéroport, un narrateur fou amoureux d’une certaine Marie qui invente la vie de celle-çi pendant leur rupture, une scène folle en plein incendie, un homme qui meurt d’une crise cardiaque sans ses chaussures… Mais pas de reflet de la réalité.

Mais le pire dans ce roman, c’est la vulgarité présente dans certains passages : le narrateur nous invente des scènes d’amour entre Marie et son nouvel amant Jean-Christophe de G… Je ne trouve pas mes mots donc ça sera un exemple : « et comme il fallait bien faire quelque chose de la bite de Jean-Christophe de G., […] elle la secoua ». Une autre sorte de vulgarité m’a gêné dans ce roman : c’est la personnalité même du narrateur, sa jalousie contre Jean-Christophe de G., ses pensées qui visent à montrer que Marie est mieux avec lui qu’avec Jean-Christophe de G.

Et pourtant, pourtant, La Vérité sur Marie est vraiment écrit magnifiquement. Jean-Philippe Toussaint a du style, il n’y a pas à dire. Sa poésie et son lyrisme, tout en clarté et en vigueur, nous entraîne dans son récit et nous envoûte. Mais même l’écriture finit par nous ennuyer : la précision de sa plume, sa rigueur, devient fatigante et, peu à peu, on lâche cette histoire, pas si passionnante de toute manière. Je l’ai récupéré seulement à la dernière scène, et trouvé son apothéose à la toute dernière phrase : « Le jour était à peine levé sur la Rivercina, et nous nous serions l’un contre l’autre dans le lit, nous nous enlacions dans la pénombre pour apaiser nos tensions, l’ultime distance qui séparait nos corps était en train de se combler, et nous avons fait l’amour, nous faisions doucement l’amour dans la grisaille matinale de la chambre – et sur ta peau et tes cheveux, mon amour, subsistait encore une forte odeur de feu. »


prix Décembre 2009


La Vérité sur Marie

de Jean-Philippe Toussaint

éditions de Minuit

17 Septembre 2009

A propos Constance

Enseignante, j'aime tout autant la littérature ado / jeune adulte que la littérature contemporaine et la bande-dessinée. J'ai souvent tendance à lire des textes écrits en français, mais je fais parfois des incursions vers de la littérature anglophone ou des traductions pour les autres langues.
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2 commentaires pour La Vérité sur Marie de JP Toussaint

  1. sylvie dit :

    Je n’ai pas trouvé vulgaire du tout. Ce serait même tout le contraire pour moi…
    Mais je comprends qu’on puisse avoir ce point de vue. Peu de gens ont apprécié dans mon entourage, au contraire de la « blogosphère » où il me semble que là, une forte majorité a rédigé des billets élogieux.

    • constance93 dit :

      je suis passé très rapidement (c’est-à-dire sans laisser de commentaire) sur ton blog : décidément, nous semblons avoir des goûts très différents ! Je n’ai lu quasiment aucune de tes lectures et celle que j’ai tout de même lu, j’en ai pensé l’inverse de toi (tu sembles avoir aimé Trois Femmes Puissantes, par exemple) ! Mais j’aime bien =D n’hésites pas à revenir me contredire sur mon blog, et je ferais pareil sur le tien (quand j’aurais un peu de temps, promis) 😉

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