Une Année chez les Français de Fouad Laroui

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Derrière l’humour, un appel à la tolérance

Dernier roman de l’écrivain d’origine marocaine Fouad Laroui, Une année chez les Français raconte dans les années 1970 les aventures du petit Mehdi Khatib dans le lycée français de Casablanca qu’il vient d’intégrer. Dès les premières pages, le ton est donné : le jeune Medhi arrive au lycée en compagnie de deux dindons. La personnalité et le statut du dans les héros nous sont également donné : marocain pauvre, Medhi est un jeune garçon fragile ne parlant que le français et dévorant les livres. Il a obtenu une bourse pour étudier dans le lycée français où, s’il réussit, lui sera offert un grand avenir en France.

Au fil de l’année, les situations cocasses vont se poursuivre. Elles sont dues aux difficultés de Medhi de comprendre l’argot français et aux préjugés de ses camarades, pions, profs et parents d’élève. Bref, le petit nouveau qui arrive dans un nouveau milieu : l’humour à fleur de peau.

L’évolution de Medhi au fil du récit, son affirmation de lui-même, est en soit un appel à la tolérance : l’enfant a du mal à saisir sa double nationalité, en grande partie à cause des préjugés de certaines personnes, par exemple la mère de son meilleur ami.

Les lectures de Medhi, et les situations qu’elles provoquent, nous font également rire : quiproquos, comparaison de personnages du livre à des personnages de conte. Sa découverte de nouveaux mots, d’argot ou non, est une autre manière de provoquer le rire : les mots inconnus que Medhi entend, il les orthographie, découpe et comprend différemment, ce qui peut donner des choses comme un « incunable » aux allures de « nain cunable » ou un « prolétaire » au sens étrange de « pro lait terre ». Sa connaissance de la langue française et son sens de la logique ainsi que sa façon incorrigible de corriger les pions prêtent aussi à rire : un enfant minuscule de dix ans reprenant un surveillant, la scène ne peut que faire rire. L’humour est très léger, très frais et relève d’une certaine originalité.

La langue est elle aussi légère. Les expressions difficiles sont toujours tournées en dérision tandis que l’argot et le langage courant sont là pour donner une lecture fluide et sans obstacle. Toute la place est laissé au récit, des moments de tendresse aux scènes cocasses hilarantes. C’est un tableau formidable de l’enfant arrivant au lycée avec tout ce qu’il y a de tragique, de drôle et d’important pour un enfant de son âge. Il y a une grande innocence derrière le personnage de Medhi, mais également dans l’écriture même.

Tout cela donne un récit drôle et émouvant, un peu trop léger et frisant parfois la caricature. Une lecture bien sympathique, toute en vivacité et facilité, mais  qui n’offre pas grand chose à y retenir finalement.

Une année chez les Français

de Fouad Laroui

ed Julliard

18 Août 2010

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quelques avis des 1eL de Loth

A propos Constance

Enseignante, j'aime tout autant la littérature ado / jeune adulte que la littérature contemporaine et la bande-dessinée. J'ai souvent tendance à lire des textes écrits en français, mais je fais parfois des incursions vers de la littérature anglophone ou des traductions pour les autres langues.
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18 commentaires pour Une Année chez les Français de Fouad Laroui

  1. Gwenaëlle dit :

    Un livre drôle et tendre apparemment mais auquel il manque un peu de profondeur, on dirait…

  2. Yspaddaden dit :

    Tu confirmes dans ton dernier paragraphe ce que je craignais en lisant ton billet : la caricature. Pas facile d’être drôle sans tomber dans l’excès et dans l’attendu…

    • constance93 dit :

      ce n’est pas tout à fait attendu, mais j’ai parfois eu l’impression que c’était excessif, oui :s
      (mais autrement, c’est une lecture très sympathique qui ressemble énormément au Petit Nicolas : très distrayante)

  3. Richard dit :

    Malgré tes réticences sur la légèreté du roman, il me semble que cette lecture pourrait me faire du bien … L’école vue d’un côté plus rigolo !
    Merci !

  4. herisson08 dit :

    Pourquoi pas alors, mais je ne vais pas me jeter dessus!!

  5. Ping : Lectures d’automne | petites lectures entre amis

  6. Sébastien dit :

    Très envie de le lire ! Avec ce que je lis comme ça, il me fait penser à Neuilly sa mère ! et les livres de Samuel Benchetrit.

    • constance93 dit :

      « Neuilly sa mère » : je n’y avais pas pensé mais c’est en effet un très bon rapprochement ! le lieu et le temps ne sont pas les même, mais il y a une grande correspondance au niveau de l’histoire et de la grande place de l’humour pour parler de la différence. en plus, c’est très léger et ça se lit très bien : tu peux y aller 😉

  7. lemesle geneviève dit :

    pas si léger que cela!il faut se replacer dans le contexte de l’époque,du pays…
    j’aime ce livre émouvant et vif qui donne de l’espoir et de l’énergie
    un éloge de la langue française qui nous offre un réel plaisir de lecture,et comme je suis libraire ,onva entendre parler de Medhi!!!

    • constance93 dit :

      il est dans le tiercé gagnant du goncourt des lycéens et je trouve cela mérité.
      c’est vrai qu’il apporte un réel plaisir de lecture, je l’ai juste trouver un peu trop « facile » sur certains points…

  8. Ilona dit :

    T’es tu interessée à l’auteur?
    Car fait étrange tout de même… Medhi entre au lycée Lyautey en 69 quand son auteur Fouad Laroui entre lui même au lycée Lyautey en 69.
    En effet mr Laroui est originaire d’un petit village marocain et obtient une bourse pour aller étudier à Casablanca tout comme notre petit Medhi.
    Et dernier point ( même s’il y a encore pleins d’autres anecdotes du même style ) Medhi n’a plus son père tout comme Laroui qui pert son père juste avant l’entrée au lycée.
    Certe quand on le lit on trouve ce roman léger et caricatural, mais quand on creuse un peu, il laisse à rélféchir…
    Fiction? Autofiction? Roman a caractere autobiographique?
    Puis si léger que ça? Il y a énormement de passages très durs pour le petit Medhi. A son âge je ne sais pas si j’aurais été capable de surmonter tout ses problèmes.
    A méditer…

    • constance93 dit :

      un livre qui se défend aussi bien n’est sûrement pas mauvais 😉
      tes questions sont des questions à poser à l’auteur, j’aimerais beaucoup le rencontrer. quelquefois, c’est en écoutant un auteur que l’on se rend compte des qualités du livre et que nous nous sommes arrêtés à des préjugés de 1e lecture. je ne sais pas.
      je médite ton commentaire pour, qui sait, peut-être un jour relire ce livre avec un autre regard 🙂

  9. XL dit :

    bonjour
    en prenant du recul, je suis tout à fait d’accord avec tes dernières lignes, il ne restera pas dans ma mémoire comme un grand moment de littérature mais comme un agréable moment de lecture : je l’ai emprunté car il était disponible à la bibliothèque et surtout parce que j’avais beaucoup plus apprécié Les dents du topographe du même auteur (également très autobiographique comme le souligne Ilona)

    • constance93 dit :

      contente de voir que mon ressenti n’est pas unique. et c’est vrai que ça reste un très bon moment de lecture.

      si je tombe un jour sur le livre dont tu parles, peut-être que je serais tenté de le lire, même si en attendant l’auteur ne m’a pas plus emballé que ça.

  10. St-Ralph dit :

    A propos des multiples malentendus au niveau du langage entre Mehdi et les autres personnages, je vous recommande mon analyse qui met l’accent sur cet aspect du roman. Beaucoup de lecteurs en parlent en mettant souvent cela sur le compte du choc des cultures alors que Mehdi est davantage pétri de la culture française que beaucoup de ses condisciples. Cela est même clairement dit dans le roman dans la bouche de la mère de son ami.

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